Keith Neal a pris sa retraite en 1999 après avoir travaillé pendant 23 ans comme chef du département de biologie d'une école secondaire de Manchester (la Manchester Grammar School). Il a commencé à collaborer avec Initiatives et Changement (I&C) quand il était étudiant et participe encore activement à des projets en Afrique.
Joseph Karanja est un avocat kenyan hautement qualifié. Nous sommes amis depuis plus de 20 ans. Il a grandi à Eldoret, une grande ville de l'ouest du Kenya. Il se souvient de ses difficultés à poursuivre ses études sans lumière électrique à la maison. Mais il a réussi grâce à une détermination sans faille et est devenu un entrepreneur d'une grande intégrité, déterminé à aider les Kenyans à sortir de la pauvreté et à bénéficier d'une vie satisfaisante.
Bien que le cabinet de Joseph se trouve à Nairobi, il n'a jamais oublié les pauvres et les démunis de sa région natale. En 2007, Eldoret fut l'épicentre de violences intertribales suite à des élections présidentielles et parlementaires. En dépit de ces évènements, de nombreux réfugiés de la région alentour se sont établis à et autour d'Eldoret dans des abris de fortune. Joseph, une église locale et un groupe de commerçants travaillent ensemble pour aider une communauté de plus de 400 familles de réfugiés – c'est-à-dire plus de 2 000 personnes.
Il y a un an, j'ai présenté Joseph à SunnyMoney, le bras commercial de SolarAid, qui vend une gamme variée de dispositifs d'éclairage solaires destinés à satisfaire les besoins en lumière de gens qui n'ont pas de raccordement au réseau électrique. Les lampes solaires permettent d'économiser de l'argent et de dépendre dans une moindre mesure du kérosène et des bougies.
L'éclairage solaire est l'un des outils utilisés pour aider à transformer cette communauté. Des progrès remarquables ont été faits pour améliorer les besoins en éducation, l'emploi et la génération de revenus mais, de manière plus significative, ceci n'aurait pas été possible sans une stratégie destinée à promouvoir la paix et la réconciliation dans la communauté. L'éclairage solaire, de manière surprenante, a joué un rôle clé dans la réalisation de cet objectif.
À l'initiative de Joseph, l'éclairage solaire a été testé à Munyaka, un quartier très pauvre d'Eldoret. Cette communauté est un microcosme qui refléte bien les besoins du pays. Les familles proviennent de tribus auparavant en guerre, profondément méfiantes les unes des autres. Elles vivent côte à côte uniquement parce qu'il n'existe pas d'autres lieux d'habitation pour elles. Elles n'ont en commun que leur statut de réfugiés. Elles ont tout perdu. Certains enfants sont orphelins et nombre d'entre eux n'ont qu'un seul parent.
Joseph a établi un comité d'organisation qui travaille en partenariat avec l'Église anglicane du Kenya de Munyaka, dirigée par le Révérend Waweru.
À Munyaka, 10 pour cent de la population seulement a accès à l'électricité. Une connexion au réseau coûte 245 £, ce que la plupart, trop pauvres, ne peuvent pas se permettre, dépendant ainsi du bois de chauffage et du kérosène. Ceux qui ne peuvent pas acheter de kérosène n'ont pas de lumière le soir et leurs enfants ne peuvent pas faire leurs devoirs.
Le projet s'est centré sur ces 400 familles de réfugiés. Sous les auspices de l'Église, le comité d'organisation accorde des prêts d'un petit montant, allant jusqu'à 28 £, à des femmes et des hommes ayant l'esprit d'entreprise pour qu'ils achètent des dispositifs d'éclairage solaire. Le comité comprend 24 femmes représentant la communauté.
Une petite lampe de bureau à éclairage solaire coûte environ 8,50 £ et la lampe Sun King Pro, plus puissante, coûte 24 £. À ce jour, 18 Sun King Pros sont utilisées par des femmes le soir, devant leurs maisons, où elles vendent leurs produits frais. Les lampes peuvent également être utilisées pour charger un téléphone portable. Les prêts sont remboursés grâce aux bénéfices obtenus. Chaque emprunteur est encouragé à garder 14 centimes par jour pour rembourser leur prêt.
Les prêts ne sont pas limités à l'achat de lampes solaires. Ils sont également accordés aux membres de la communauté qui souhaitent créer des entreprises au niveau local.
Plus de 260 familles possèdent maintenant une lampe solaire.
Pour Joseph Karanja, les lampes solaires sont utilisées comme instruments de paix et de réconciliation. Il écrit : ‘Notre groupe utilise les lampes solaires comme symboles de paix et de développement. Tout d'abord, lorsqu'une personne d'un des deux côtés souhaite faire une démarche de réconciliation, il ou elle donne la lampe en cadeau à l'autre côté. Cela signifie que la personne qui fait la paix sera transparente et ne tentera pas de léser l'autre. Il s'agit de marcher dans la lumière. Ensuite il s'agit également d'un symbole de pureté. À l'inverse des lampes au kérosène et du bois de chauffage qui émettent de la fumée, la technologie solaire est une énergie propre. Cela signifie qu'il n'y aura plus d'influences externes susceptibles de faire du mal à un autre être humain. Dans notre contexte, les politiciens polluent nos esprits, en particulier en période d'élections. Enfin, en offrant une lampe solaire, on permet au destinataire de lire et d'écrire, et d'exercer une activité économique, ne serait-ce que modeste, ce qui est bénéfique. Chaque réconciliation réussie les motive à relever d'autre défis.
‘Notre communauté d'Eldoret était à une époque profondément divisée, mais aujourd'hui elle promeut l'apaisement et la réconciliation. Notre communauté a travaillé pendant près d'un mois avec une ample population de Soudanais du sud résidant à Eldoret, en vue de se réconcilier les uns avec les autres, et ce, déjà avec grand succès.
‘Nous avons réussi à acheter 20 lampes solaires chez SunnyMoney en décembre 2013. Notre communauté va les donner à des communautés pastorales de Baringo, un comté voisin. À ce jour, nous avons fait don de 60 lampes. Le gouverneur adjoint de Baringo, Mathew Tuitoek, est l'organisateur de la visite. Les membres de la communauté d'Eldoret partageront leur expérience de paix et de développement durable avec les communautés agitées de Baringo, dévastées par le fléau du vol de bétail.’
Traduction par Marie-Louise Bautista