Cercles de Femmes Artisans de Paix dans le bidonville de Huruma au Kenya
Du 15 au 17 avril, des Femmes Artisans de Paix ont participé au Cerlce qui se tenait dans le quartier de Huruma. C’était le 4e à se tenir dans un bidonville de Nairobi. Comme dans la plupart des bidonvilles, les services de base tels que l’eau, les égouts, les routes d’accès et les toilettes sont inadéquats et parfois absents. L’insécurité règne et toute personne qui y circule, en particulier les ‘étrangers’ à la zone, doit faire preuve de beaucoup de prudence. Cela n’a toutefois pas empêché les Femmes Artisans de Paix d’y apporter leur message aux femmes qui y vivent.
Au départ, les participantes se sont focalisées sur les changements qui doivent intervenir chez les dirigeants et chez les autres, plutôt que chez elles-mêmes. Alors que les Artisans de Paix se fondent sur la connaissance de soi et la transformation personnelle, de nombreuses participantes avaient tendance à considérer ce que, selon elles, d’autres devaient apprendre, ou à parler des manquements des dirigeants. A partir du deuxième jour, elles ont compris et commencé à prendre conscience qu’il s’agissait de reconnaître son propre rôle dans la création de la paix et de se prendre en main.
Les principaux sujets d’inquiétude dans ce groupe sont la criminalité, l’insécurité, le tribalisme et les attaques d’Al Shabab sur le sol kenyan. Précédemment, une grenade lancée sur un bus qui se rendait à Humera avait fait au moins sept morts et 34 blessés. Une dame a expliqué les répercussions que peut entraîner le fait de dire la vérité à propos de l’insécurité. « Nous sommes conscients de vivre avec des criminels. Si vous en informez les autorités, les gangsters viendront vous attaquer pendant la nuit. » Les autres participantes l’ont exhortée à signaler tout acte répréhensible de manière anonyme.
Le partage de son vécu, qui marque souvent un tournant, a fait ressortir de profondes souffrances. Certaines femmes hésitaient à s’ouvrir et à raconter leur histoire mais l’une d’entre elles, qui avait vécu une expérience transformatrice en partageant son histoire, les a encouragées. « Vous ne savez pas ce que vous ratez. Si vous le saviez, vous raconteriez et vous trouveriez une épaule sur laquelle vous appuyer. Le pardon doit venir des profondeurs de votre cœur. C’est un cheminement. » leur a-t-elle dit.
Après avoir vu le film « Au-delà du pardon », qui raconte l’histoire de Ginn Fourie et de Letlapa Mphahlele en Afrique du Sud et comment ils ont dépassé leur douleur pour aider à la guérison et à la réconciliation dans leur pays, les femmes ont partagé les réflexions que le film a provoquées. En tant que mères, elles savent la douleur de perdre un enfant, et le pardon serait la dernière chose à accorder à celui qui vole la joie d’être mère. Si Ginn, dont la fille a été tuée, a été capable de pardonner, d’avancer et de créer une association avec Letlapa, l’homme qui était derrière les actions ayant mené à la mort de sa fille, pourquoi pas nous ? se sont demandées les femmes. Nulle souffrance n’est comparable à une autre, mais les femmes ont senti qu’elles venaient d’entamer le chemin qui mène au pardon dans leur propre vie.
Pamela et sa fille Purity faisaient partie des participantes. Il y eut un moment de silence quand, devant tout le monde, Pamela s’est excusée auprès de sa fille des paroles insultantes qu’elle lui avait adressées quelques années plus tôt. Purity en avait parlé dans d’autres forums sociaux mais sa mère n’avait jamais réalisé combien ces paroles avaient pesé sur sa fille et l’empreinte qu’elles avaient laissée. C’est Purity avec un large sourire accepta les excuses de sa mère.
Le pardon mène à la paix intérieure. Une participante a raconté comment la colère l’amenait à arracher ses vêtements et à vouloir blesser quelqu'un. Elle est maintenant en route pour trouver sa paix intérieure afin de gérer sa colère. « Je partirai d’ici plus forte. Plus forte que lorsque j’ai participé au premier cercle de paix. »
Après trois jours de Cercles de Paix, les femmes ont déterminé les actions à entreprendre et se sont engagées à inviter d’autres femmes à partager un espace où se connecter et participer à la construction de la paix dans leur communauté. Elles ont même élu l’une d’entre elles, Pamela, pour être leur leader et ont convenu de se retrouver tous les lundis à 15 heures à partir du 20 avril 2015.
L’équipe des Femmes Artisans de Paix du Kenya remercie certains membres du Cercle de Paix de Sydney pour l’appui financier qu’elles ont apporté à cette formation.
La formation et son compte-rendu ont été réalisés par Wambui Nguyo, Mumbi Wambugu.
Pour plus d’information, contacter Mediatrix Masava.
Traduction par Camille de Stoop