Les Cercles de Paix : du succès à la portée
« Avant je pensais que j’étais la seule qui avait toujours raison et qui pouvait parler et prendre les bonnes décisions. La formation des Cercles des Femmes Artisans de Paix (The Creators of Peace Circles ou CoPC) m’a changée. J’ai appris à écouter les autres et à respecter leurs opinions sans discrimination. J’ai partagé les leçons apprises au sein de mon église où je suis leader. Maintenant je donne à chacun une chance de s’exprimer et nous prenons les décisions ensemble. » C’était un commentaire d’une des participantes à la toute première réunion formelle de suivi des Cercles des Femmes Artisans de Paix au Kenya, qui a eu lieu dans le comté de Nakuru le 28 avril 2015, rassemblant un total de 20 femmes sélectionnées au hasard parmi les diverses formations ayant eu lieu depuis 2007 lorsque le programme a été introduit au Kenya.
Il s’agit d’une des nombreuses réunions de suivi ayant lieu cette année pour évaluer l’impact du programme des Femmes Artisans de Paix (CoP) dans le pays. Le programme CoP a été introduit au Kenya en 2007 par Jean Brown (Australie), Tehmina Siganporia (Inde) et Ann Njeri Ndiangui-Kimanthi (Kenya). Depuis lors, plus d’un millier de femmes dans tout le Kenya ont pu participer au programme. Huit ans plus tard, l’équipe du CoP au Kenya a pris la décision d’y retourner et d’évaluer l’importance et l’impact du programme sur les vies des participantes et au-delà.
Les participantes se souvenaient-elles des différentes sessions auxquelles elles avaient participé au cours de la formation ? Oui. Pour la plupart, c’était toujours très frais dans leur mémoire. Et c’était une très bonne indication du fait que les leçons tirées du programme étaient très utiles dans leurs vies.
Le point le plus mentionné dans la réunion a été « le pouvoir du pardon ». La plupart des participantes se sont volontairement confiées sur la manière dont cela a énormément changé leurs vies et ce, de manière positive, et influencé les autres autour d’elles. « Les Cercles des Femmes Artisans de Paix m’ont guérie de la maladie du tribalisme dont j’ai souffert pendant assez longtemps après la violence suivant les élections de 2007 au Kenya » a déclaré Elizabeth.
« Ensemble, avec d’autres femmes qui ont participé à la formation, nous avons pu pardonner et nous rapprocher de personnes appartenant au groupe ethnique qui nous avait attaqués » a-t-elle déclaré.
Margaret, une bénéficiaire des Cercles de Paix, a raconté comment elle a vécu une vie pleine d’amertume et de colère envers les membres les plus proches de sa famille pendant 9 ans. Elle avait l’habitude de porter un couteau sur elle pour essayer de se venger de sa coépouse suite à l’échec de son mariage. Les séances de partage d’histoires lui ont donné un regain de force et d’espoir par rapport à sa situation et elle a décidé de se défaire de son couteau et de pardonner. Ses proches n’arrivaient pas à y croire et sa décision les a amenés à se remettre en question. Cela a changé les membres de sa famille qui étaient toujours en désaccord.
Joyce a raconté qu’elle a dû partager une chambre avec une dame qu’elle considérait comme son ennemie. Mais après s’être confiées l’une à l’autre au cours de la formation, elle a appris que cette dame avait encore plus souffert. Elle a ainsi saisi l’importance de se réconcilier avec elle. Cette expérience lui a donné du courage et lui a ouvert les portes pour servir sa communauté. « J’ai maintenant le courage de m’adresser aux gens sur les questions de renforcement de la paix, et les habitants de mon quartier ont confiance en moi et m’ont même donné le nom de Mama Kijiji (Mère de la communauté) pour prêcher la paix sans relâche. »
Alors que les femmes se sont confiées sur leurs vies après la formation des Cercles de Paix, on peut dire que le programme a clairement changé beaucoup de vies, directement et indirectement. Un grand nombre d’entre elles ont raconté comment elles sont devenues des modèles à émuler, et cela a mené à la nomination de la plupart d’entre elles comme leaders au sein de leurs communautés et d’un point de vue religieux.
Rosemary a raconté comment le fait de savoir écouter et d’être écoutée a transformé sa vie. « J’ai découvert le pouvoir d’être écoutée et cela a rendu ma vie bien plus facile et m’a aidée à apprendre à écouter aussi, » a-t-elle déclaré. De plus, Rosemary a lancé une initiative pour sensibiliser les enfants au message de paix une fois par semaine. « N’oublions pas de prêcher la paix à nos enfants qui prendront le relais en matière de leadership lorsque les adultes ne seront plus là » a-t-elle déclaré.
Alors que la réunion touchait à sa fin, l’équipe du programme CoP était contente. Les résultats du travail accompli sont plus importants et touchent les gens de manière positive par milliers. Les femmes ont fait le voeu de ne pas laisser les défis auxquels elles font face jour après jour les empêcher de vivre leurs vies de femmes artisans de paix.
Une promesse de paix a été récitée par tout le monde à l’unisson, rappelant les promesses faites dans leurs coeurs et à Dieu pour créer le changement.
Comme symbole de paix, et comme une façon pour les femmes de se réengager elles-mêmes comme créatrices de paix, des bougies ont été allumées. Et puisqu’une bougie ne perd rien tout en permettant d’en allumer une autre, elles se sont engagées à maintenir le feu de la paix vivant et à le passer aux autres. L’allumage des bougies fut accompagné de chants et de danses au rythme des paroles « La paix commence avec moi, la paix commence avec toi, la paix dans le monde commence avec nous. »
Mumbi Judy et Njeri Kimanthi
Traduction par Marie-Louise Bautista